L’étude des variantes génétiques liées à la santé et aux maladies est un trait distinctif de la Médecine Personnalisée et/ou de Précision (PPM). En exploitant les possibilités des nouvelles technologies génomiques (e.g., Séquençage Nouvelle Génération), les scientifiques travaillant au sein de la PPM souhaitent produire (ce qui peut être appelée) une génomisation de la maladie ; c'est-à-dire une amélioration de son diagnostic, de la stratification des risques liés à son apparition, ainsi que de la prise en charge clinique des patient·e·s concerné·e·s qui soit informée par une connaissance approfondie du fonctionnement de notre génome.
Bien que le potentiel de la génomique pour éclairer l’étiologie et la progression de maladies complexes (e.g., maladies cardiovasculaires, cancers) trouve une large reconnaissance dans les discours publics autour de la PPM, le travail nécessaire pour atteindre cet objectif est traversé de nombreux défis. L’introduction et l’usage des technologies de séquençage haut débit font évoluer la frontière entre clinique et recherche et induisent une réorganisation des pratiques pour un ensemble de professionnel·e·s (e.g., chercheur·e·s, clinicien·ne·s, technicien·ne·s). Loin de constituer uniquement des nouvelles manières d’appréhender, de comprendre et d’intervenir sur la maladie, les analyses génomiques opèrent à travers un dispositif technologique, scientifique et institutionnel qui est encore en devenir. L’entrée de la génomique dans le monde hospitalier demande en effet des ajustements aussi au niveau du contexte institutionnel et socio-politique de la santé (e.g., stratégies hospitalières, éthique de la recherche).
Ce projet souhaite montrer que la génomisation de maladies complexes met en tension un ensemble de savoirs et de pratiques préexistants et nécessite un travail complexe, ainsi que collaboratif, d’alignement de technologies particulières, d’éléments scientifiques, médicaux, moraux, et juridiques. Nous faisons l'hypothèse que l’émergence de la PPM repose non seulement sur la validation de ses dispositifs technoscientifiques (e.g. outils d’analyse génomique), mais également sur la mobilisation d’expertises différentes et la reconfiguration de standards et de pratiques institutionnels où s’affrontent des soucis moraux spécifiques ainsi qu’une demande sociale pour le développement de la PPM.
Dans le but d’étudier comment la production de la PPM, à travers la génomisation de maladies, requiert un alignement d’éléments théoriques, méthodologiques, cliniques et institutionnels, ce projet se dote d’une perspective théorique ancrée dans les Sciences Sociales (i.e., Études des Sciences et des Techniques - STS). La méthode de recherche favorise un examen attentif du travail pratique réalisé dans le cadre de la PPM et vise à documenter comment ce travail se déploie dans différents contextes (e.g., laboratoires, unités médicales), passe par la renégociation de standards scientifiques, cliniques et institutionnels et est traversé par les différentes expériences des acteurs et actrices impliqué·e·s (e.g., chercheur·e·s, clinicien·ne·s, patient·e·s-participant·e·s).
Ce projet bénéficie d’une collaboration étroite avec les chercheur·e·s du Projet FNS Sinergia « DoPHiS – The Development of Personalized Health in Switzerland: Social Sciences Perspectives » (Prof. Francesco Panese) et de l’Unité de Médecine de Précision du CHUV (Prof. Jacques Fellay).
Le projet est financé par « La Commission de la Recherche » FBM-UNIL à travers le dispositif “Financement en recherche sur les humanités 2018”.
Plus d’information : Luca Chiapperino (Responsable du Projet); Mélody Pralong (Collaboratrice de Recherche)