Immersion
L'immunothérapie, qui consiste à mobiliser les cellules de son propre corps pour lutter contre certains types de cancer, suscite de grands espoirs. Actuellement au stade expérimental, de nouveaux traitements personnalisés permettent de cibler encore plus précisément les tumeurs.
À travers cette série Immersion, nous vous proposons d'entrer dans les coulisses d'un essai clinique prometteur mené au CHUV, qui s'attaque au mélanome métastatique en misant sur la culture et la réinjection de lymphocytes T prélevés directement dans la tumeur.
C'est une première en matière de communication et de transparence: des patients et des professionnels engagés dans un essai clinique d'une rare complexité ont accepté la présence d'une équipe de journalistes du Service de la communication du CHUV à chaque étape-clé. Suivez-les ici pas à pas.
Les témoignages présents dans ce dossier ont été recueillis entre 2019 et 2021.
Le protocole est expliqué en détails au patient, qui doit donner son accord formel. Espoirs, risques, effets secondaires: aucune question n'est esquivée.
Donner son consentement libre et éclairé est la condition fondamentale pour pouvoir participer à un essai clinique. Chacun vit cette étape différemment, en fonction de son parcours et avec plus ou moins de questionnements, comme nous le racontent Pierre et Robert.
La Dre Angela Orcurto est l’une des deux médecins qui accueillent les patients pressentis pour participer à l'essai, afin de leur expliquer en détail ce qui les attend. Au cours de deux entretiens, elle passe en revue «de A à Z» le protocole, ainsi que le formulaire de consentement.
Pour savoir si la thérapie cellulaire a des chances de succès, une partie du mélanome est prélevée par un chirurgien, qui l'envoie au laboratoire pour analyse.
«J’ai dû attendre cinq jours, c'était long»
Après le consentement, le prélèvement chirurgical est un deuxième moment de vérité: les patients ne pourront aller de l'avant dans l'essai que si les lymphocytes extraits de la tumeur se multiplient correctement en laboratoire.
«Ces prélèvements sont une véritable course contre la montre»
Lors de l’intervention chirurgicale, il n’est pas question de débarrasser le patient de son cancer, car ce dernier est bien trop avancé, mais de prélever une pièce — métastase ou organe — qui doit servir à l’élaboration du traitement personnalisé. Explications avec le Prof. Nicolas Demartines, chef du service de chirurgie viscérale, qui opère avec son équipe les patients que nous suivons ici en Immersion.
Le patient subit une série de tests qui confirmera s'il remplit bien les conditions pour participer à l'essai.
«À chaque fois, c'est l'angoisse qu'ils vous disent non»
Comme tous les patients inclus dans le protocole, Pierre doit se soumettre à une batterie d’examens étalés sur trois semaines, dont chacun est éliminatoire. Un seul résultat négatif, et il ne pourrait plus participer à l’essai.
«Nous organisons tous les rendez-vous et examens»
Dès lors qu’ils ont signé le formulaire de consentement, les patients subissent plusieurs tests qui vont déterminer s’ils sont aptes à recevoir le traitement. Explications avec Virginie Zimmer, attachée de recherche clinique.
Au laboratoire, les lymphocytes présents dans la tumeur, dits lymphocytes T, sont isolés. Ils ont 14 jours pour se multiplier par milliards.
«Fabriquer un produit thérapeutique sur-mesure, c’est très gratifiant»
Au laboratoire, les lymphocytes T prélevés dans la tumeur du patient sont cultivés. Ils sont immergés dans un milieu de culture composé notamment de nutriments et de protéines, qui agit comme un engrais. En près d’un mois, ils peuvent atteindre jusqu’à 100 milliards et sont rendus plus performants. Rencontre avec Clément Murgues, superviseur de production au Centre de thérapies expérimentales.
Pendant une semaine, le patient reçoit une chimiothérapie. Le but? Mettre à plat ses défenses immunitaires et préparer le terrain pour l'arrivée des lymphocytes T.
«Chimio, le mot fait peur, mais je l’ai plutôt bien vécue»
Lorsqu’ils arrivent au CHUV pour la chimiothérapie qui va les préparer avant la transfusion de leurs cellules, les patients sont souvent déterminés. C’était le cas de Pierre*, qui avait compris l’importance de cette étape dans son combat contre le cancer.
«A cette étape, tout le monde doit monter à bord du bateau de l’alliance thérapeutique»
Afin de préparer le corps du patient à recevoir ses cellules «boostées» en laboratoire, une chimiothérapie est nécessaire. Elle marque la première étape d’une hospitalisation de plusieurs semaines, pendant lesquelles l’équipe médico-soignante devra être particulièrement attentive à l’état du patient. Pauline Keraron, infirmière clinicienne spécialisée en oncologie, nous livre les détails de cette étape importante.
Étape cruciale et très délicate où le patient, sous haute surveillance, se voit réinjecter ses propres cellules. Elles doivent en découdre avec le mélanome métastatique. Une fois réinjectés dans le corps du patient, les lymphocytes T continuent d'être «boostés» par le biais de perfusions.
«Une épreuve intense pour notre corps»
Le jour de la transfusion est un moment important, cliniquement et symboliquement. Le patient, sous haute surveillance, se voit réinjecter ses propres cellules. La phase de stimulation qui va suivre est une étape délicate.
«Une médecine ultra spécialisée ne doit pas sous-estimer l’importance du contact humain»
La chimiothérapie terminée, le jour de la transfusion arrive enfin. Étape cruciale et très délicate où le patient, sous haute surveillance, se voit réinjecter ses propres cellules. Elle sera suivie par une phase où les lymphocytes seront encore stimulés dans le corps du patient. Le Dr Lionel Trueb, médecin associé dans l’unité d’hospitalisation dédiée à ces traitements, nous livre ses explications.
Le corps et l'esprit se remettent, toujours sous surveillance. Quand le patient est suffisamment en forme, il peut rentrer chez lui. Les lymphocytes T ont-ils fait leur travail? Trente jours après la réinjection, le patient passe un scanner qui livre les premiers résultats de cette offensive.
«Un effet secondaire imprévisible m’est tombé dessus»
Le traitement terminé, il est temps de récupérer. Les patients doivent encore fournir un effort pour se remettre physiquement et psychologiquement, avant de pouvoir rentrer chez eux. Un mois après, un premier bilan est réalisé: des résultats très attendus.
«Comme après un marathon, le corps se remet à son rythme»
Le corps et l'esprit se remettent, accompagnés de près par les équipes médico-soignantes. Quand le patient est suffisamment en forme, il peut rentrer chez lui. Les lymphocytes T ont-ils fait leur travail? Trente jours après la réinjection, le patient passe un scanner qui livre les premiers résultats de cette offensive. Martina Imbimbo, cheffe de clinique, nous décrit ces étapes.