Psychiatrie: réduire les effets indésirables des médicaments

Actualité du 07.11.2017

Le groupe de recherche du Prof. Chin Bin Eap (Département de psychiatrie) a identifié un facteur précoce pour prédire une hypercholestérolémie chez les patients suivis en psychiatrie. Leur étude a été publiée dans le Journal of Clinical Lipidology.

Mme Aurélie Delacrétaz, biologiste qui vient de terminer sa thèse dans l'Unité de pharmacogénétique et psychopharmacologie clinique du CHUV (Centre de neurosciences psychiatriques), travaille depuis plusieurs années en collaboration étroite avec le Service de psychiatrie générale (Prof. Philippe Conus) et le Service universitaire de psychiatrie de l’âge avancé (Prof. Armin von Gunten) du CHUV. Elle s’intéresse aux effets indésirables induits par des médicaments couramment utilisés en psychiatrie. En particulier au fort risque de troubles lipidiques et à d’autres signes d’un syndrome métabolique, qui associe typiquement une obésité et un diabète. Cette augmentation du risque de syndrome métabolique est d’une part liée aux maladies psychiatriques et à des facteurs environnementaux (alimentation, manque d’activité physique), d’autre part peut être favorisée par le traitement pharmacologique.

La nécessité d’identifier précocement la détérioration lipidique induite par des psychotropes

Les psychotropes, tels que les antipsychotiques, ont permis d’améliorer considérablement la prise en charge des patients atteints de maladies psychiatriques sévères, telles que la schizophrénie ou les troubles de l’humeur. Néanmoins, comme c’est le cas pour un grand nombre de médicaments, des effets secondaires sont observés lors de traitements avec des antipsychotiques, certains stabilisateurs de l’humeur ou certains antidépresseurs. Ces médicaments peuvent induire des troubles lipidiques considérables, dès les premières semaines de traitement, considérés comme un facteur de risque important pour le développement futur de maladies cardiovasculaires. Par ailleurs, cet effet secondaire n’est pas systématique et peut être très variable entre les personnes. Cette variabilité pourrait être expliquée en partie par des facteurs génétiques, soulignant qu’une approche thérapeutique personnalisée est nécessaire.

Une solution pour améliorer la prise en charge pharmacologique des patients suivis en psychiatrie

L'étude, publiée le 16 octobre 2017 dans la revue Journal of Clinical Lipidology, examine la relation entre une modification lipidique après un mois de traitement avec des psychotropes connus pour induire un tel effet secondaire et une détérioration lipidique ainsi qu’une dyslipidémie (concentration anormalement élevée de cholestérol ou d'acides gras dans le sang) après trois et douze mois. Le Prof. Chin Bin Eap explique que : « Les analyses ont montré qu’une augmentation des taux lipidiques égale ou supérieure à 5% après le premier mois de traitement permet de prédire une détérioration lipidique importante ainsi que la survenue d’une dyslipidémie à plus long terme - après trois et douze mois de traitement ». Les patients dont les paramètres lipidiques augmentent de 5% ou plus après un mois de traitement sont donc à risque de présenter une détérioration lipidique significativement plus élevée sur une année et ceci indépendamment du type de traitement prescrit, de l’âge ou du genre.

Cette analyse permet de déceler précocement les patients qui présentent un risque élevé d’hypercholestérolémie après un an de traitement. En pratique, ces données devraient permettre de rendre attentif le prescripteur quant à la probabilité de développer de futurs problèmes métaboliques et ainsi d’offrir une prise en charge personnalisée. Il convient de mentionner que, précédemment, le groupe de recherche du Prof. Chin Bin Eap a également démontré qu’une prise de poids égale ou supérieure à 5% permettait de prédire une prise de poids importante sur le long-terme. Des stratégies cliniques incluant des interventions préventives sur le mode de vie devraient être mises en place pour prévenir ces effets indésirables métaboliques. De plus, une adaptation précoce du traitement (p. ex. un changement de traitement) devrait être envisagée, après une évaluation clinique intégrant la balance risque-bénéfice, dans le but de minimiser la détérioration des paramètres métaboliques chez les patients.
 

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