Campagne PENbank x PBK9

Du 16 au 29 septembre 2024, la PENbank affiche quatre récits d’expérience de médecins du CHUV et d’Unisanté au centre-ville de Lausanne. Cette campagne est le fruit d’une collaboration avec quatre membres du collectif PBK9.

Découvrez ici la démarche derrière la campagne ainsi que les affiches situées à la Place de la Riponne, rue Centrale, rue du Pont et rue de la Louve. Localisez les quatre affiches sur le plan.

Une collaboration PENbank x PBK9

La PENbank, qu’est-ce que c’est?

La PENbank est une banque de récits permettant de recueillir, conserver, visibiliser et explorer ce que vivent les plus de 2000 médecins du CHUV et d’Unisanté. C’est un dispositif innovant qui permet de donner voix aux médecins, de donner à voir leur expérience vécue, de leur venir en soutien, de rapprocher de manière originale l’hôpital et la population et de conjuguer science et humanité.

En 2020-2021, le projet PENbank a été financé par Spark, l’instrument d’encouragement pour des projets innovants du Fonds National Suisse. Le financement initial a notamment permis le développement du site internet de la PENbank pour la transmission des récits. Depuis 2023, l’implantation et le déploiement de la PENbank sur le terrain de l’hôpital sont possibles grâce à un financement de la Fondation Leenaards.

La PENbank vise trois objectifs: la visibilisation régulière des récits collectés, la restitution de leur contenu à diverses instances de l’hôpital et la conduite d'études sur ce matériel unique. Elle constitue un observatoire de l’expérience des médecins, pour mieux comprendre ce qu’iels font et vivent au quotidien.

Le collectif PBK9

PBK9 est un collectif romand mixte composé d’une dizaine de professionnel-les des arts graphiques et de la communication. Le collectif a pour but de promouvoir et de diffuser le travail des artistes de la région par l’organisation d’expositions, d’ateliers créatifs et d’animations live ainsi que par la réalisation de productions originales.

4 artistes du collectif ont participé à l’illustration des récits PENbank: Ash Aly Molly, City, Florent Meylan et NASH-Nicolas Ryffel.

Pourquoi des récits de médecins en ville?

Un récit de médecins?

Les récits de médecins collectés et stockés dans la PENbank offrent un éclairage unique sur leur expérience quotidienne de la pratique médicale. Transmis anonymement, ils prennent diverses formes: textes, images ou photos/dessins. Ils constituent une riche source de données pour comprendre les défis comme les sujets de satisfaction et de préoccupation des médecins.

Visibiliser l’expérience des médecins auprès du public

La recherche s’est beaucoup intéressée aux pratiques des professionnel-les, d’un côté, et au vécu et à l’expérience des patient-es, de l’autre. Par contre, la figure du médecin, son rôle et ses évolutions, sa subjectivité ou encore plus largement la singularité de son expérience sont peu investigués. En affichant des récits de médecins dans un espace public, la PENbank souhaite rendre leur expérience accessible au plus grand nombre de personnes, au-delà du cercle professionnel et de la communauté scientifique.

La pandémie de COVID-19 a montré la fragilité de la relation médecin-patient-e, qui oscille entre confiance et méfiance, admiration et peur, reconnaissance et rejet. La visibilisation large des récits de médecins est une manière d’entrer en dialogue autour de leur expérience et de promouvoir une relation plus réaliste et empathique entre les médecins, les patient-es, leurs proches et le public.

Les récits illustrés

Découvrez ci-dessous les 4 affiches avec les récits de médecins et leur illustration par les membres du collectif PBK9.

Affiche #1 – Illustration par Ash Aly Molly

On est mercredi, je suis en train de tomber amoureuse, je trouve les arbres plus verts, le ciel plus beau, les gens plus souriants. Les patients me racontent leurs douleurs, elles résonnent en moi si légèrement que je me demande si je suis une bonne médecin.

Affiche #2 – Illustration par City

Tu as réussi à respirer tout seul, dès qu’on t’a sorti du chaleureux ventre maternel, et je t’en remercie. J’étais bien plus soulagée que toi, je te le promets, quand j’ai entendu ton cri vif et clair. Et là, tu aimerais juste que je te rende au sein de ta mère, au lieu de m’efforcer de mesurer ton tour de crâne ou de vérifier que tu écartes bien les bras quand je te bascule vers l’arrière. Je te rends très vite, ne t’inquiète pas.

J’ai un badge qui dit que je suis médecin, et un téléphone dans la poche qui sonne quand on a besoin d’un pédiatre en salle d’accouchement. Jamais ma confiance quant aux compétences des RH n’a été si ébranlée que le jour où ils m’ont confié cette responsabilité (et pourtant, ô combien fragile était-elle).

Je t’ai inspecté de la tête aux pieds pour vérifier que rien ne manquait, rien n’allait de travers. Tu ne te rends pas compte à quel point ces quelques minutes avec toi, au calme dans la salle d’examen, me font du bien. Je te replace doucement dans ton petit lit, et m’emplis de tout le miracle que tu incarnes de tes 3200g de vie.

Pour retourner dans le tourbillon de ces premiers jours de travail.

Bip bip. «Cet enfant respire vite. On a déjà fait ça et ça, qu’est-ce qu’on fait maintenant?» Je n’en sais rien. «J’appelle ma cheffe et je te redis.» Pendant que j’essaie d’atteindre ma cheffe, je tombe sur une autre infirmière, qui me pose une autre question. Puis c’est un parent qui me hèle, car il aimerait savoir comment exactement on peut voir si le pansement est prêt à être enlevé. Ou si vraiment ce soin est le meilleur pour son enfant, étant donné qu’il a l’impression qu’un autre serait mieux.

Je rame, je nage, je cours, je réfléchis, je me dépêche, je me concentre, je me souviens, j’oublie, je reviens, je repars dans l’autre sens, je doute, je demande, j’attends, je rattrape, je m’excuse, j’explique, j’écoute, je cherche, je demande, j’attends, je recherche, je devine, je... m’épuise.

Affiche #3 – Illustration par Florent Meylan

Il est 2h31 du matin, la 6e fois que mon bip de piquet sonne. J’essaie de trouver la sonnerie la plus douce pour finir ma nuit, suffisamment douce pour ne pas faire battre mon cœur à 200 à l’heure à chaque fois qu’il sonne, suffisamment bruyante pour être sûre à 200% que mon sommeil s’interrompe pour l’entendre. Et je me demande… à partir de combien de sonneries mon cœur s’hypertrophie suffisamment pour ne plus sursauter à chaque sonnerie.

Affiche #4 – Illustration par NASH-Nicolas Ryffel

Parfois mes collègues qui ne travaillent pas en gériatrie me disent que j’ai la belle vie, que la réadaptation gériatrique, c’est tranquille. J’aimerais leur montrer une journée type:

  • 08h-08h15: remise de garde
  • 08h15: premiers appels de l’équipe infirmière pour soit un patient qui ne se sent pas bien, soit une demande sur la prise ou non d’un traitement, soit un patient qui refuse justement de prendre ses traitements et que, dans l’imaginaire collectif, la présence seule du médecin ferait changer d’avis
  • Donc 08h15-09h15: je cours entre les patients qui vont objectivement moins bien, ceux qui sont agités, ceux qui profitent de me voir (courir) dans le couloir pour me demander pourquoi ils ont mal au genou depuis 1970. J’enchaîne entre les appels, les patients, les prescriptions, les contrôles
  • 09h15: je file enfin aux toilettes, en profite pour vérifier mes mails du travail (on en reçoit une vingtaine par jour)
  • 09h30-10h30: point de la situation avec l’équipe infirmière
  • 10h30: je commence ma tournée auprès des patients, mais entre ceux qui sont en physiothérapie, ceux en ergothérapie, ceux qui refusent de me voir, ceux qui ne vont pas bien, ceux qui vont au contraire bien et me demandent sans cesse pourquoi ils ne peuvent pas rentrer chez eux, ceux qui me disent aller bien avec 3l d’oxygène, des jambes comme des poteaux et une respiration haletante…
  • 12h: je devrais aller manger mais je n’y arrive pas, la paperasse qui s’accumule me coupe l’appétit
  • 13h-14h: formation obligatoire, j’en profite pour grignoter un sandwich
  • 14h-15h: rencontre avec une famille
  • 16h-16h45: nouvelle entrée (faire connaissance du patient, remplir son dossier, transmettre les informations à l’équipe multidisciplinaire, appeler ses proches, appeler le médecin traitant, comprendre pourquoi elle est sous ibuprofène 3x/j alors qu’elle a une insuffisance rénale carabinée)
  • 17h-17h30: nouveau point de la situation avec l’équipe infirmière
  • 17h30: remise de garde
  • De 17h45 jusqu’à pas d’heure: je pense enfin me poser pour écrire mes dossiers... mais mon bip sonne, une famille veut me voir... j’en ai encore probablement pour longtemps.

Et demain ça recommencera…

Impressum
Équipe PENbank: Céline Bourquin Sachse, Friedrich Stiefel, Amaelle Gavin, CHUV, formulaire de contact
Réalisation des affiches: Ah! Studio | Aliénor Held

 Dernière mise à jour le 17/09/2024 à 13:05