
La tuberculose est aujourd’hui évitable et traitable. Pourtant, cette maladie infectieuse qui s’attaque aux poumons cause encore 1,3 million de décès chaque année et représente la deuxième cause de mortalité en Afrique subsaharienne. Une situation due, en partie, au manque de radiographies thoraciques et de tests moléculaires dans les soins de santé primaires.
Le Service des maladies infectieuses du CHUV, en partenariat avec le Laboratoire pour les technologies intelligentes de santé globale de l’EPFL, le Swiss Tropical and Public Health Institute, le Centre national hospitalier de pneumologie du Bénin, l’Université des sciences du Mali, l’Université de Stellenbosch (Afrique du Sud) et l'Institut de médecine tropicale d'Anvers (Belgique), a récemment reçu un financement pour un projet visant à implémenter un outil de diagnostic accessible et abordable: l’ultrason pulmonaire assisté par l’intelligence artificielle (IA).
Ce nouvel algorithme est compatible avec les appareils d’ultrasons portables à brancher sur un smartphone, et déjà largement utilisés. Très sensible, il se présente avant tout comme un outil de tri: « Lorsqu’un patient se présente avec des symptômes, l’algorithme de l’ultrason permet de détecter rapidement la probabilité d’être atteint de la tuberculose » explique Véronique Suttels, cheffe de clinique adjointe au Service des maladies infectieuses du CHUV, qui a consacré sa thèse de doctorat à cette thématique. Autre avantage : une fois la tuberculose écartée, des pathologies, telles que la pneumonie ou une atteinte cardiovasculaire, pourront être identifiables grâce à ce dispositif.
Une solution innovante basée sur l’IA et le partage de données
La force de cet outil révolutionnaire réside non seulement dans son accessibilité et son coût financier, mais également dans sa technologie digitale innovante, intégrant l’interprétation d’images d’ultrason assistée par l’IA. « L’algorithme augmente la performance de lecture des images, rendant ce test très sensible. Cette technologie permet à du personnel de santé non-médecin d’utiliser l’outil, grâce à l’aide l’intelligence artificielle dans l’interprétation des données. Son implémentation à large échelle dans des centres ruraux, où les médecins sont rares, sera ainsi facilitée » se réjouit la Professeure Noémie Boillat-Blanco, médecin adjointe au Service des maladies infectieuses du CHUV. Elle ajoute : « Grâce à l’IA, tous les critères de l’Organisation mondiale de la santé en matière d’outil de tri pour la tuberculose sont remplis ».
Ce projet repose sur une collaboration interdisciplinaire, permettant, grâce au partage de données cliniques et échographiques, un enrichissement continu des performances de l’IA. Le modèle sera, par ailleurs, en open access. Il mobilise des spécialistes de multiples domaines, tels que l’infectiologie, la recherche clinique, le diagnostic médical, la data science, l’informatique, les sciences sociales, l’économie et la politique de santé.
Un dispositif accessible et largement implémentable pour lutter contre la tuberculose
En offrant cette solution portable et abordable, ce projet vise à faciliter le diagnostic, à améliorer l’accessibilité aux soins et à réduire les coûts liés au traitement tardif de la tuberculose. Nommé CAD LUS4TB, ce projet est, pour la partie recherche clinique, dirigé par la Dre Véronique Suttels et la Pre Noémie Boillat-Blanco du Service des maladies infectieuses du CHUV, en étroite coopération avec le Laboratoire pour les technologies intelligentes de santé globale de l’EPFL. Il a reçu un financement de 10 millions d’euros sur cinq ans du programme Horizon de la Commission Européenne et débutera en automne 2025 au Bénin, au Mali et en Afrique du Sud.