Rencontre avec Claire Charmet, nouvelle Directrice générale du CHUV
La nouvelle directrice générale du CHUV a pris ses fonctions le 1er juin 2025. Claire Charmet connait déjà bien l’institution qu'elle a pu observer dans le cadre de sa fonction de membre du conseil stratégique. Rencontre avec une femme qui a fait de la gestion hospitalière son métier depuis 15 ans.
Âgée de 42 ans, Claire Charmet dirigeait depuis 2020 le site hospitalier de La Chaux-de-Fonds et présidait le collège des directions du Réseau hospitalier neuchâtelois en alternance bisannuelle. Cette professionnelle du monde de la santé a notamment décroché un MBA International Healthcare à Francfort et un a suivi une formation de directrice d'hôpital en France. Forte de 15 ans d’expérience à différents postes dans le milieu hospitalier, elle a pris la tête du CHUV au 1er juin 2025. Rencontre.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de rejoindre le CHUV?
J’ai été directrice d’hôpital dans plusieurs établissements. C'est mon métier depuis 15 ans et je fais cela depuis 5 ans en Suisse. Tous les dix ou vingt ans, une opportunité vous oblige à répondre à un appel. Le CHUV en fait partie. C’est une institution que je ne pouvais pas ignorer.
Quel regard portez-vous sur un hôpital universitaire comme le CHUV aujourd’hui?
Je sais ce qu’est un hôpital. J’en connais le cœur de métier. Le CHUV est un millefeuille complexe : soins de base, soins de recours très spécialisés, recherche, enseignement... C’est un acteur profondément ancré dans la vie quotidienne du canton, et je vais en découvrir les spécificités.
Premières impressions?
C’est une très belle institution, avec un outil de travail impressionnant et des équipes engagées, motivées, qui se sentent appartenir au CHUV. Ce que j’en vois, c’est une structure qui répond bien à sa mission, aussi bien pour les soins courants que les soins de recours, et qui porte une belle dynamique de recherche.
Quelles expériences vous ont préparée à ce rôle?
J’ai volontairement occupé presque tous les postes possibles dans un hôpital : direction des ressources humaines, finances, investissements, systèmes d’information, stratégie, et même direction médicale. J’ai piloté des projets immobiliers stratégiques comme la construction d’un nouvel hôpital ou des restructurations majeures. J’ai été membre de l’équipe de direction dans cinq établissements, le CHUV sera le sixième. Ces diverses expériences m’ont apprises qu’il n’y a pas de solution unique : ce qui ne fonctionne pas dans un hôpital peut réussir ailleurs. Chaque institution a son histoire, son contexte, sa culture. J’ai aussi connu le monde hospitalier sous un autre angle : comme étudiante, je faisais des petits boulots le ménage d'un établissement. Cela m’a permis de voir les unités et les services de l’intérieur.
Qu’est-ce qui vous motive?
Faire quelque chose d’utile. Je ne soigne pas, je ne bâtis pas et je ne paie pas les salaires, mais je veux que les patients soient bien pris en charge, que les collaborateurs travaillent dans de bonnes conditions et que les partenaires soient satisfaits. C’est ça, la mission de service public.
Votre conception du leadership?
Plus une structure est grande, plus il faut structurer les relais internes. L’essentiel est d’être d’accord sur la destination, d’avoir une méthode claire, transparente, juste. Il faut que cette méthode soit applicable dans toute l’institution, en "fractale". Le grand enjeu aujourd’hui, c’est: qui décide? Sur quelles valeurs? Quels objectifs? On doit fixer un cadre, des règles claires, car les patients traversent tous les départements. La taille ne change rien au fond, mais cela demande plus de coordination.
Quelles valeurs vous semblent essentielles?
Le courage, le sens des responsabilités, les valeurs du service public. Être équitable. Être cohérent dans ses décisions, pouvoir les expliquer. Prendre en compte les faits, l’analyse, mais aussi l’humain. Les facteurs humains bien sûr ne doivent pas être dysfonctionnels, mais s’ils respectent le cadre, ils doivent aussi être pris en compte. Ce que je veux, c’est une ligne commune pour l’institution dans le cadre d’une vision globale qui dépasse les silos.
Vous serez la première femme à diriger cette institution: est-ce un élément déterminant, selon vous?
Être une femme, d’origine étrangère, n’a jamais été un problème dans mon parcours. Même si certaines situations en Suisse, comme lorsque ma banque appelle mon mari pour valider un virement entre nos comptes communs, me rappellent qu’il y a encore du chemin. Je ne porte pas activement un message féministe mais je comprends que je peux illustrer qu’être une femme et avoir un poste à responsabilité est loin d’être incompatible. Ce qui m’importe pour moi, c’est la qualité du travail, pas les apparences.
Propos recueillis par Stéphane Benoit-Godet, chef de la communication